Au Printemps 2018, RamDam propose à l’association Scènes d’enfance – ASSITEJ France d’inscrire un rendez-vous dédié à la musique jeune public dans le cadre du Tour d’Enfance. Cette série de rendez-vous thématiques initiée avec les réseaux jeune public des territoires et parrainé par le ministère de la Culture, a pour objectif de mettre en lumière les dynamiques territoriales et les enjeux de la création jeune public.
Le 11 juillet 2018, dans le cadre des Francofolies à la Rochelle et en partenariat avec la SACEM, RamDam réunissait au Café Pollen artistes, producteurs, sociétés civiles, programmateurs artistiques et collectivités locales autour du spectacle de musique jeune public dans le format convivial et participatif d’un world café.
Chacun a pu circuler autour de 5 tables pour apporter des éléments de réponse à 5 questions, s’exprimer et nourrir les problématiques identifiées, ses aspirations pour l’avenir, et entendre les autres dans un esprit d’échange et de dialogue interprofessionnel nécessaire à l’évolution des pratiques, avec pour seules consignes:
- partager la réflexion
- exprimer ce qu’on a en tête et dans le coeur
- écouter
- relier et connecter les idées
- jouer, crayonner, dessiner
- s’amuser.
Ce compte-rendu est une synthèse des échanges qui ont eu lieu à cette occasion, dont les nuages de mots permettent de visualiser les idées principales qui en ont émergé. RamDam remercie l’ensemble des partenaires qui ont rendu possibles cette expérimentation et tous les participants qui ont accepté de se prêter au jeu de ce 1er rendez-vous « Remue-méninges ».
Table 1 // le passé : Et si nous racontions l’histoire du spectacle de musique jeune public?
On présenterait d’abord la musique classique, avec des oeuvres telles que Pierre et le loup de Prokofiev, et puis un tournant dans les années 60 avec l’usage plus populaire de la télévision et des médias. Des chanteurs comme Henri Dès, Steve Waring, Anne Sylvestre mais aussi Chantal Goya ont popularisé la chanson, la comptine et ont aussi révélé l’enfance comme une cible marketing.
La musique jeune public s’est également développée au gré des évolutions sociales et des politiques publiques. L’arrivée des congés payés et la fréquentation des colonies de vacances, les nouvelles méthodes pédagogiques et le développement de l’éducation artistique et culturelle ont également pris le relai dans le rôle initial de transmission que pouvait avoir la famille.
Aujourd’hui, c’est l’arrivée des nouvelle technologies et notre nouveau rapport à l’image qui mettent en question le spectacle de musique jeune public: on peut se demander si le seul spectacle de musique existe encore?
Table 2 // l’avenir : Imaginons l’avenir du spectacle de musique jeune public
Au gré de nos avancées dans le virtuel, et de la perte de notion de transmission au sein de la famille (écouter de la musique en famille), que peut devenir le spectacle de musique jeune public?
On peut imaginer qu’il rassemble davantage, que les différents niveaux de lecture qu’il offre soient une richesse unique pour partager et créer du lien entre différentes générations. La concentration sur l’artistique pourrait hisser le spectacle jeune public vers une meilleure considération au sein des programmation artistiques, et un décloisonnement plus grand entre le « jeune public » et le « tout public.
Une meilleure diffusion de l’information et un meilleur relai des médias permettraient de le défaire de cette image du « parent pauvre » du spectacle.
Table 3 // le présent : Si nous devions dire ce qu’est le spectacle de musique jeune public aujourd’hui?
De la musique en live avec la présence d’au moins un musicien sur scène, et une spécifié d’adresse… mais encore? Quelles sont ses richesses, et quels peuvent être leurs écueils?
La création jeune public d’aujourd’hui rattrape la force dramaturgie du théâtre. Dans ce contexte, la création musicale jeune public sort d’un ghetto et commence à se structurer. Elle est multiple par ses genres, ses formes, son interdisciplinarité, ce qui traduit une plus grande considération artistique pour l’espace scénique et des possibilités qu’il offre. Mais cela peut aussi impliquer plusieurs pièges:
- l’amateurisme : comment faire de la qualité artistique dans tous les domaines, sans moyens de production? Comment organiser, dans cette économie fragile, un regard extérieur souvent nécessaire?
- l’image : elle est parfois trop présente au détriment de la musique.
- la spécificité d’adresse: elle peut aussi bien cataloguer l’artiste dans le seul secteur du « jeune public » autant que représenter une filière attractive d’un point de vue strictement économique dans une économie globale précaire.
Deux injonctions peuvent également lui porter préjudice: le participatif et l’action culturelle, tandis que l’artiste doit se concentrer sur une écriture
qualitative.
L’école joue sans doute un rôle important dans ce qu’est le spectacle de musique jeune public aujourd’hui. Le réseau Canopée, par exemple, met à disposition des outils qui rendent les élèves moins passifs, et leurpermettent d’émettre un avis sur ce qu’on leur propose. Ils sont encore trop peu utilisés par les enseignants. Aujourd’hui même si la chanson n’est plus « moralisatrice », il demeure beaucoup d’autocensure vis-à-vis de certains types de musique (classique, hip hop metal…)
Table 4 // l’aide à la création musicale jeune public: comment améliorer l’existant?
Plus il y en a, mieux c’est!
Aujourd’hui toutes les esthétiques peuvent être aidées, mais des critères spécifiques au jeune public et ses particularités économiques pourraient être prises en compte pour une meilleure adéquation des dispositifs avec la réalité du processus artistique.
Il faudrait pouvoir accompagner la création dès le début de l’écriture, en soutenant la résidence d’écriture sans nécessairement y associer l’action culturelle.
Conseiller les artistes, créer des espaces et des lieux de concertation interprofessionnels. La journée dédiée aux écrituresthéâtrales pourrait être la journée dédiée aux écritures scéniques dans leur ensemble.
L’exigence des enfants: la musique jeune public n’est pas simplement récréative.
Il faut augmenter les synergies entre:
- l’Etat, les collectivités, les producteurs/diffuseurs et réseaux.
- les co-producteurs, dont les réseaux sont à géométrie variable selon les territoires
Il faudrait un listing, annuaire des ressources Son économie semble basée sur la diffusion, destinée aux diffuseurs et aux actions dirigées vers le jeune public. accompagner les diffuseurs dans l’accueil du jeune public
Table 5 // Quel serait le modèle d’aide à la création idéal pour la musique jeune public?
Il faut d’abord différencier ce qui relève des spécificités de la musique et/ou du jeune public, et ce qu’elle a de commun aux autres formes de création vivante.
On constate d’abord un déficit de demandes pour la création musicale jeune public qui serait liée à une méconnaissance des dispositifs. Il faudrait donc d’abord une meilleure visibilité des dispositifs d’aide.
Le modèle d’aide à la création idéal aurait une plus grande souplesse à l’égard de la structuration des équipes artistiques (elles varient d’un territoire à l’autre, selon le statut privé/public de chacun, association, société etc.) Il prendrait en compte la temporalité de la création dans son ensemble à partir de l’écriture, et privilégierait les échanges entre artistes et avec ceux qui les accompagnent (lieux de résidence, co-producteurs, diffuseurs etc.)
Le lien entre l’ambition d’une écriture artistique qualitative et le prix moyen d’un billet pour un spectacle jeune public est mis en question. Maintenu à un faible niveau pour une plus grande accessibilité des publics scolaires notamment, il alimenterait la faiblesse économique du spectacle jeune public. Cela aurait également pour conséquence un certain manque d’estime du jeune public vis-à-vis de la création globale. Le jeune public doit pouvoir être considéré comme toute autre forme de création.